C’est sous le signe d’un Brésil aux facettes multiples qu’Ecume nous convie ce soir. Cette terre pétrie, au fil de son histoire, du brassage souvent douloureux de ses populations, va se confier à nous.
Entre terre et ciel nous fera cheminer dans ce Brésil contrasté où les mondes s’entrechoquent, mais s’interpénètrent, la Terre rurale et citadine, le Ciel des croyances ancestrales et celui du mysticisme.
Ces chocs culturels trouveront leurs échos dans un répertoire musical délibérément éclectique : de l’incantation à la Pombagira , issue d’un rituel du lCandomblé – culte de possession afro Brésilien -, au syncrétisme de la Missa Afro-Brasileira de Fonseca, des mélodies savantes de Villa-Lobos imprégnées cependant d’influences populaires, au Calice exaspéré et révolté de Chico Buarque , pour aboutir enfin aux chansons dansantes de la Musique Populaire Brésilienne actuelle – samba et bossa nova – .
Ces oppositions, ces contrastes entre Terre et Ciel seront soulignés par un conte de João Guimarães Rosa – créant ainsi un contrepoint audacieux, s’infiltrant entre les différentes parties de « l’ordinaire « de la Messe.
La création visuelle de l’Image Indépendante nous accompagnera dans cet univers troublant et fascinant.
Sylvie Golgevit
Figure majeure de la littérature brésilienne, João Guimarães Rosa publiait en 1956 Grande Sertão : Veredas, un roman-fleuve où un semi-analphabète, bandit de grand chemin devenu propriétaire rural, raconte sa vie à un visiteur venu de la ville enquêter sur un monde en voie de disparition… Trois jours d’affilée, ce visiteur écoute son hôte s’interroger sur sa traversée du Brésil Central – de ce Grand Sertão où circulent de curieuses histoires, comme celle de Maria Mutema, reçue d’un compagnon de combat, un soir auprès du feu.
Il était donc une fois, dans le Minas Gerais, au pays des diamants, un hameau proche du paradis terrestre, et une femme que deux crimes successifs conduisent à la sainteté… L’histoire édifiante d’une émanation du Mal absolu trouvant dans le repentir le chemin du salut? Ou une tragédie greco-brésilienne – Maria, Erynnie au service de la Diké plutôt que suppôt de Satan? Voire un exemple de casuistique hindouiste – la veuve noire s’inoculant le poison de la solitude après avoir sanctionné le Karma de ses victimes?
uant à sa « »conversion » »? Une pure leçon d’Alchimie. Metteur en scène de l’Oeuvre au Noir le missionnaire étranger réalise la transmutation du Mal en cohésion sociale: autour de sainte Mutema, parfait avatar féminin du bouc émissaire, le village entier est régénéré.
Le Grand Sertão de Guimarães Rosa perpétue les paraboles de la Tradition Universelle dont le catholicisme romain n’est qu’une composante occidentale.
Francis Uteza